N° 188 – 4e trim. 1999
Liminaire
Ce numéro à thèmes multiples – mais tous les thèmes ne se rejoignent-ils pas dans la louange de l’Unique? – s’ouvre sur un court condensé de la foi orthodoxe par Olivier Clément. Dense et équilibré, il pourrait avantageusement servir d’outil catéchétique pour ceux qui, loin des spéculations d’école désirent s’abreuver à la source vivante du « patrimoine de sainteté» et de beauté, d’intelligence aussi », de l’Église orthodoxe.
Dans une étude ample et fouillée sur le cœur chez Pascal et dans la tradition hésychaste, Daniela Palasan nous montre comment sur ce sujet peuvent se rejoindre un courant de la spiritualité en Occident avec l’importante tradition hésychaste de l’Orient. Centre d’intégration des facultés humaines, lieu de la révélation de la personne, le cœur dans sa profondeur indicible peut seul saisir « la profondeur indicible de Dieu ». Dans cette démarche, au dire de l’auteur, Jésus-Christ peut remplir un rôle de médiateur entre l’abîme du cœur et l’abîme divin. Notre civilisation de l’action éprise d’efficacité, où l’être est tourné vers l’extérieur et souffre de la séparation funeste entre le cœur et la raison, doit retrouver le chemin du cœur, descendre dans ses profondeurs pour y découvrir, ou même y « sentir », la présence de Dieu. Le psychologue Jung voit dans la négation de la composante spirituelle de l’homme l’origine des grandes névroses contemporaines.
Le père Boris Bobrinskoy nous livre une profonde méditation sur le mystère, au sein de la Trinité, du jaillissement paradoxal du Verbe à partir du silence de Dieu. La parole au-delà de toute parole suscite les créatures et en l’homme, ce vis-à-vis de Dieu, elle est appelée à germer en silence, à l’image du Christ. L’auteur rappelle qu’en Église le langage liturgique et théologique d’ailleurs dans l’Église tout est langage – est appelé à s’élever « vers le silence de la communion », où tout se tait.
À partir d’un extrait des écrits de saint Silouane, le père Michel Evdokimov donne cohérence à une série de thèmes qui s’entrecroisent dans la quête incessante, menée dans les larmes par le grand starets de l’Athos, qui s’était mis à l’école de l’Esprit Saint « pour apprendre de lui l’humilité du Christ « . Cette humilité lui permettra de tenir son esprit dans l’enfer des hommes, de se reconnaître frère de tous les descendants d’Adam, et de découvrir qu’aimer ses ennemis c’est en définitive aimer une partie de soi-même. Nous retrouvons ici cette catégorie de l’émerveillement, évoqué par Olivier Clément dans le premier article, devant la beauté de la création jaillie du souffle divin, et qui sert de fil conducteur aux divers thèmes abordés dans ce numéro.
Ce numéro paraîtra, avec quelque retard, courant janvier. Le passage à l’an 2000 se sera fait par les célébrations, chargées d’espérance, de Noël où par l’envoi de son Fils sur terre se déverse tout l’amour du Père pour sa créature dans son désir non de la juger mais de la sauver, et de l’Épiphanie, ou mieux de la Théophanie, manifestation du Dieu en trois personnes sur les bords du Jourdain. L’humble scintillement de l’étoile à Bethléem s’épanouit dans l’éclat de la lumière théophanique et culminera, dans quelques mois dans l’embrasement pascal. C’est avec une confiance renouvelée qu’ainsi nous nous acheminerons vers le troisième millénaire.
Le moment vient de faire le bilan de ces 2 000 années où a pu résonner le message de la Bonne Nouvelle et de se tourner vers le temps à venir. Notre prochain numéro sera justement consacré au thème qui a mobilisé les membres du Xe congrès de la Fraternité orthodoxe en Europe occidentale, à Paray-le-Monial, au début de novembre 1999 : « Le christianisme ne fait que commencer » (d’après le titre d’un livre du père Alexandre Men).
En ce début d’année toute l’équipe de Contacts vous souhaite, à vous fidèles lecteurs, « que le Dieu de l’espérance vous remplisse de toute joie et de toute paix dans la foi, pour que vous abondiez en espérance, par la puissance du Saint Esprit » (Rom 15,13).
Contacts
Sommaire
Liminaire
[p. 289-290]
Petite introduction à la connaissance de l’Eglise orthodoxe
[p. 291-300]
Olivier Clement
Le cœur chez Pascal et dans la tradition hésychaste
[p. 301-345]
Daniela Palasan
Théologie du silence et prière liturgique
[p. 346-349]
Père Boris Bobrinskoy
Saint Silouane, moine de l’Athos et la quête de l’Esprit
[p. 350-356]
Père Alexandre Schmemann
Bibliographie
[p. 357-375]
· The Sacred Gift of Life. Orthodox Christianity and Bioethics – John Breck
[p. 357-358]
· Traité de l’Incarnation. Contre Nestorius – Jean Cassien
[p. 358-359]
· Les chemins du coeur – Javier Melloni
[p. 359-361]
· La prière, expérience de l’éternité – Archimandrite Sophrony
[p. 362-364]
· Histoire Lausiaque – Pallade d’Hélénopolis
[p. 364-365]
· Icons of the Holy Monastery of Pantocrator
[p. 365-366]
· Icônes et fresques du père Grégoire
[p. 366-368]
· La Bible d’Alexandrie
[p. 368-369]
· Fêtes chrétiennes à Jérusalem – Sophrone de Jérusalem
[p. 369-371]
· La doctrine des douze apôtres (Didachè)
[p. 371]
· Lettres festales (XII-XVII), tome III – Cyrille d’Alexandrie
[p. 372-373]
· La bienfaisance et les aumônes – Cyprien de Carthage
[p. 373-374]
· Gisors dans l’Histoire – Jean-Paul Besse
[p. 375]