N° 145 – 1er trim. 1989
Liminaire
En hommage à Jacques Vidal, le grand spécialiste de la science comparée des religions, mort prématurément il y a peu, nous publions en tête de ce numéro, une brève méditation en forme de poème que lui avait inspirée une des plus belles icônes de la « Vierge de Tendresse ».
On trouvera ensuite, de Constantin Agoras, une présentation de L’Anthropologie théologique de Jean Zizioulas, aujourd’hui Métropolite de Pergame.
Dans la pensée indo-européenne, qui pose une unité ontologique du divin et du monde, l’Essence ou, chez Plotin et dans Vedanta, la Suressence, occupe une place décisive. Pour les Pères, comme le souligne Jean Zizioulas, ce sont l’Amour et la Liberté. L’Inde voit Dieu et le monde comme deux manifestations d’un Absolu impersonnel. La Grèce tenait que la vérité est cosmologique et anhistorique. Pour les Pères, elle s’identifie à la communion, elle est crucifiée par la liberté tragique de l’homme, le péché et la mort s’équivalent sans autre réponse que la Résurrection. L’être est relationnel, il naît de la communion.
La Grèce antique et l’Inde réduisent toute altérité, la seconde immerge tout dans le Soi. Les Pères dits grecs (en réalité égyptiens, syro-palestiniens, cappadociens…), pour la première fois dans l’histoire, ont cerné le mystère de la personne. C’est parce qu’il est personnel que Dieu reste, en son fond, inaccessible. C’est parce qu’il est personnel qu’il peut sortir de sa transcendance pour se rendre participable. En l’homme aussi, « l’existence se ramène non à la substance mais à la personne ». L’image de Dieu en l’homme ne peut être conceptualisée, la personne n’a pas de qualités, elle dépasse sa « nature » biologique, sociologique et psychologique tout en la faisant exister dans la relation, tout en ouvrant sa finitude sur la Résurrection. Altérité et communion, reflet du mode d’existence trinitaire, coïncident dans l’amour et la liberté.
Suivent deux études, nullement coordonnées d’ailleurs, de Tatiana Goritchéva et Olivier Clément, sur Les animaux dans la pensée orthodoxe. Au moment où les chrétiens de toutes confessions se préoccupent de la « sauvegarde de la création », il est urgent que l’Orthodoxie s’exprime. Ces deux études concernent un aspect trop oublié de la vie cosmique, le mystère du monde animal.
Les Pères Romul, Théophane et Irénée, tout trois Roumains qui, le premier enseigne, les deux autres élaborent des thèses à l’Institut de théologie orthodoxe St-Serge, à Paris, évoquent dans La Parole de Dieu en langue roumaine, le tricentenaire de la parution de la Bible en langue roumaine et le 340e anniversaire de la première édition roumaine du Nouveau Testament. Bel exemple pour réfuter le « mythe des langues sacrées », déjà exorcisé par les apôtres des Slaves, Cyrille et Méthode, mais qui tend à réapparaître aujourd’hui dans certains milieux orthodoxes.
Nous publions enfin, en nous excusant du long retard, le dernier chapitre du cours de Paul Evdokimov sur l’herméneutique orthodoxe.
Contacts
Sommaire
Liminaire
[p. 3]
Vierge de Tendresse
[p. 4-5]
L’anthropologie théologique de Jean Zizioulas
[p. 6-23]
Constantin Agoras
Les animaux dans la pensée orthodoxe
I – Tatiana Goritcheva
[p. 24-35]
II – Olivier Clément
[p. 35-44]
La parole de Dieu en langue roumaine :
– La Bible de Bucarest (1688)
– Le Nouveau Testament (1648)
[p. 45-56]
Pères Romoul, Théophane et Irénée
Principes de l’Herméneutique orthodoxe :
III – Méthodes modernes et typologie
[p. 56-64]
Paul Evdokimov
Chronique
• Olivier Clément, docteur
« honoris causa » de l’Université de Louvain
[p. 65-68]
• La question uniate – Vladimir Porech
[p. 68-69]
Bibliographie
• Introduction à l’histoire et l’ecclésiologie de l’Église melkite – Serge Descy
[p. 70-74]
• Les chrétiens et leur histoire – Pierre Vallin
[p. 74]
• Ministères et charismes dans l’Église orthodoxe – Mgr Stéphanos
[p. 75-77]
• Vie de saint Colomban et de ses disciples – Jonas de Bobbio
[p. 77-78]
• Le synaxaire (Tome II). Vie des saints de l’Église orthodoxe
[p. 79]