Contacts, n° 229

N° 229 – 1er trim. 2010

Liminaire

Le temps du Carême est celui du ressourcement à l’« unique nécessaire » dont parle l’Évangile. Les moines nous y invitent. L’ancien Joseph l’Hésychaste (1898-1959), contemporain de saint Silouane au Mont-Athos, a été le principal restaurateur du mode de vie hésychaste sur la Sainte-Montagne, en particulier de la « prière de Jésus » (encore appelée « prière du cœur »). Ses disciples ont, après sa mort, répandu, par leur activité et leur rayonnement, son enseignement et sa pratique dans toute la Grèce, à Chypre et jusqu’en Amérique du Nord. On dit souvent, à juste titre, que le renouveau actuel de la Sainte-Montagne est dû en premier lieu à l’œuvre commune du starets Sophrony (1896-1993), disciple de saint Silouane de l’Athos, qui partit en Occident fonder le monastère de Saint-Jean-Baptiste à Maldon (Essex), de l’Ancien Païssios (1924-1994), ermite exceptionnel connu pour son discernement et ses paroles de vie, et des disciples de l’Ancien Joseph l’Hésychaste. On trouvera donc dans le premier texte de ce volume composite le témoignage extraordinaire du P. Éphrem de Philothéou sur ce que fut son apprentissage à la prière de Jésus et à l’hésychasme sous la guidance de l’Ancien Joseph l’Hésychaste.

Ce thème de l’acquisition de la tranquillité intérieure, l’hésychia, nous amène tout naturellement à une réflexion sur la signification évangélique de la paix, en particulier sur la scène de l’histoire. C’est ce que nous propose Claude Lepelley dans une très belle méditation de Carême. Il rappelle que l’histoire contemporaine révèle comment des disciples de Jésus, « avec les seules armes non violentes de l’Évangile », ont su affronter les forces du mal et finalement les vaincre.

Saint Dimitri de Rostov (1651-1709), grand prédicateur russe de la 2e moitié du XVIIe siècle, que nous présente le P. Antoine Lambrechts dans son bel article, vivait, lui aussi, à une époque de bouleversements culturels et ecclésiaux. Confronté à des divisions confessionnelles en Ukraine, il ne manqua pas d’enrichir son Église de quelques « perles spirituelles » tirées du christianisme d’Occident, son grand message étant de ne rien préférer au Christ : dans toutes les circonstances de la vie rester attachés au Christ et à Lui seul, car Il est la « perle unique » que nous devons désirer et chercher de toutes nos forces.
Les trois contributions suivantes sont consacrées à plusieurs aspects de l’œuvre de Vladimir Lossky, l’un des théologiens orthodoxes les plus éminents du XXe siècle qui, en appelant à une démarche néo-patristique, rappela que toute théologie renvoie à l’expérience spirituelle et consacra ses efforts à mettre en lumière la portée essentielle de la théologie hésychaste et palamite.

On sait qu’au XIVe siècle à Byzance, saint Grégoire Palamas, engagé dans une controverse décisive pour l’Orient chrétien, se fit le défenseur d’une véritable théologie de l’hésychasme et il a cherché à dialoguer avec les théologiens catholiques sur ce thème délicat et souvent conflictuel. C’est ce que nous retrace Joost Van Rossum dans sa remarquable étude intitulée « Vladimir Lossky et sa lecture de Grégoire Palamas ». Il rappelle que, fondée sur une expérience vivante de l’hésychasme (on peut d’ailleurs, encore aujourd’hui, visiter les lieux où saint Grégoire pratiqua la prière du cœur, près de la ville de Veria et à l’Athos), la théologie palamite n’est pas un système mais un logos théologique rendant compte d’une vérité centrale : « Le même Dieu est à la fois imparticipable et participable », transcendant dans son essence et personnellement présent dans ses énergies incréées.

Dans sa communication, Michel Stavrou s’intéresse à deux questions ecclésiologiques, cruciales pour la réflexion orthodoxe contemporaine, dont s’était saisi en son temps Vladimir Lossky : d’une part le problème de la synthèse ecclésiologique entre christo-logie et pneumato-logie, en d’autres termes la juste considération du rôle actif du Christ et de l’Esprit Saint dans l’Eglise ; d’autre part la question du juste rapport entre la personne et la collectivité ecclésiale.

Enfin, Françoise Jeanlin prolonge avec bonheur cette réflexion ecclésiologique en s’intéressant à la place de la Mère de Dieu dans la théologie de Vladimir Lossky. Elle montre bien comment, pour celui-ci, la Vierge Marie a franchi la limite qui nous sépare du siècle futur. Le mystère de l’Église se trouve ainsi inscrit dans deux personnes accomplies : la personne divine du Christ et la personne humaine de la Mère de Dieu, l’une, « hypostase divine incarnée », l’autre, « hypostase humaine déifiée ». Cette association nous renvoie immédiatement en ce temps à l’icône de la mise au tombeau du Sauveur, où le visage de Marie éplorée se penche sur celui de son fils et Seigneur, endormi dans l’attente de la résurrection : « Ô Christ, toi la Vie, Tu as été déposé dans le tombeau ; par ta mort Tu as fait périr la mort et Tu as fait jaillir la vie pour le monde. »

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Contacts

Sommaire

Liminaire
[p. 3-5]

Souvenirs d’un enseignement du père Joseph l’Hésychaste
[p. 6-17]
Père Éphrem de Philothéou

Un message de paix dans un monde de violence
[p. 18-24]
Claude Lepelley

Saint Dimitri de Rostov entre Orient et Occident
[p. 25-37]
Père Antoine Lambrechts

Vladimir Lossky et sa lecture de Grégoire Palamas
[p. 38-59]
Joost Van Rossum

Quelques réflexions sur l’ecclésiologie de Vladimir Lossky
[p. 60-73]
Michel Stavrou

La place de la Mère de Dieu dans la théologie de V. Lossky
[p. 74-85]
Françoise Jeanlin

Tribune libre
[p. 86-88]
Père Jean Roberti

Bibliographie
[p. 89-103]