N° 122 – 2e trim. 1983
Liminaire
Dan-lllie Ciobotea, dans une longue et dense réflexion théologique, et Olivier Clément, dans une brève étude d’exégèse, rappellent comment, d’un point de vue orthodoxe, le Christ est «la vie du monde», puisque tel est le thème choisi par le Conseil Œcuménique des Eglises pour sa sixième Assemblée. Sur la croix, la vie même de Dieu, sa lumière, atteignent l’homme dans sa plus grande déréliction. Désormais l’homme-en-Christ — et le Corps ecclésial du Christ est le lieu d’une Pentecôte perpétuelle — retrouve sa vocation de créateur créé, dans le mouvement d’une eschatologie active.
Le Père Michel Evdomikov traduit et annote les Fragments d’Ivan Kiréievsky, avec Komiakov le principal penseur religieux de la Russie dans la première moitié du 19e siècle. On trouvera d’abord dans ce texte une vision passablement mythique de l’histoire russe, vision qui semble représenter une constante dans la conception que se fait d’elle-même l’autre Europe, l’Europe hellénique et orthodoxe (il suffit de penser au mythe de Byzance dans l’Orthodoxie grecque contemporaine), et dont il faudra bien faire un jour une sorte de psychanalyse historiue, avec plus de respect, de nuances, d’intuition spirituelle qu’un Alain Besançon. Car la seconde partie de ces Fragments présente l’ébauche d’une philosophie inspirée par l’expérience spirituelle, dans une perspective patristique et philocalique. Ici en effet la philosophie n’est pas conçue comme un préalable pour approcher la révélation, mais comme l’expression d’une intelligence unie au noûs Christou, métamorphosée par la révélation. Cette tentative, que devaient reprendre les philosophes religieux russes, n’a pas encore abouti et reste notre tâche. Dans cette perspective, le texte de Kiréievsky est étonnament suggestif.
Dominique Cerbelaud dans L’évolution de la «légende d’Agbar» et les origines de l’iconographie chrétienne clarifie le problème du célèbre mandilion sur lequel le Christ aurait imprimé son visage, version tardive d’une légende qui en a connu d’abord quelques autres et dont le noyau de vérité semble le suaire aujourd’hui à Turin et longtemps caché à Edesse.
Dans les chroniques, nous présentons la thèse importante que vient de soutenir Marie Sémon, fille de Vladimir Lossky, sur Les femmes dans l’œuvre de Léon Tolstoï, et nous publions la communication de Mgr. Kallistos (Ware) sur L’unité dans la diversité, la vocation orthodoxe en Europe occidentale. Premier évêque orthodoxe d’origine anglaise, Mgr. Kallistos enseigne à Oxford l’histoire et la théologie de l’Eglise orthodoxe. Evêque auxiliaire de l’Archevêché grec de Grande Bretagne, il est chargé de promouvoir la pastorale de langue anglaise au sein de ce diocèse. Il fait partie de la commission théologique mixte anglicane-orthodoxe. C’est l’un des animateurs de la Fraternité orthodoxe en Grande Bretagne et en Europe occidentale.
Sommaire
Liminaire
[p. 97-98]
Jésus-Christ, Vie du Monde : une approche théologico-spirituelle orthodoxe
[p. 99-126]
Dan-Illie Ciobotea
« Tout est accompli »
[p. 127-135]
Olivier Clément
I.V. Kiréievsky : Fragments
[p. 136-158]
Traduction Michel Evdokimov
L’évolution de la « Légende d’Abgar » et les origines de l’iconographie chrétienne
[p. 159-172]
Dominique Cerbelaud
Chronique
– Les femmes dans l’œuvre de Tolstoï
[p. 173-179]
Marie Sémon
– L’unité dans la diversité : La vocation orthodoxe en Europe occidentale
[p. 179-190]
Evêque Kallistos Ware
Bibliographie
• Pour que l’homme devienne Dieu – F. Brune
[p. 191-196]
• Le starets Ambroise d’Optino – John B. Dunlop
[p. 196-198]
• Vie de l’icône en Occident – Le Messager orthodoxe n°92
[p. 198]
• Quand la nuée se levait – Bruno Hussar
[p. 198-199]