N° 121 – 1er trim. 1983
Liminaire
Tatiana Goritchéva, qui vit aujourd’hui à Parla après son expulsion d’Union Soviétique, est typique de ces intellectuels russes qui, ces dernières années, ont trouvé le Christ au terme de l’expérience de l’athéisme et d’une liberté morale tragique au sein même de la servitude politique. On sait que Tatiana Goritchéva a été l’une des fondatrices du mouvement féministe russe, et plus précisément de sa branche chrétienne, « Maria ». Nous publions ici, sous le titre Monastère, les notes qu’elle a rédigées en 1979, lors de séjours dans des monastères. Il y a là des indications importantes sur le cheminement spirituel d’une partie de l’Intelligentzia russe contemporaine, et aussi sur la vie des monastères qui subsistent en URSS, presqu’uniquement dans les Pays Baltes et la région de Pskov. On notera en particulier le réalisme du combat spirituel contre les forces démoniaques. Il est certain que le développement du « séminaire libre » de Léningrad s’était réalisé dans le rayonnement de ces monastères et de leurs startsi. On trouvera aussi dans ces pages une appréciation renouvelée de l’importance du témoignage monastique dans le monde d’aujourd’hui, s’il n’est pas refus du monde mais prière pour son salut et sa transfiguration.
C’est pourquoi la pensée religieuse russe ne s’est jamais désintéressée de la dimension sociale de l’homme. Elle a tenté d’envisager la «question sociale» dans une perspective proprement théologique et ecclésiale, celle de la sobornost, moins comme la recherche de recettes précises que pour dévoiler « un nouvel aspect du christianisme, son aspect social, une nouvelle figure de l’esprit de l’Eglise et de son œuvre créatrice ». L’étude documentée de Pierre Rosniansky sur « La signification sociale du christianisme dans la philosophie religieuse russe… » nous rappelle un pan entier des élaborations de la diaspora, aujourd’hui quelque peu occulté par un piétisme et une « ecclésiolâtrie » explicables mais limitatifs.
Elisabeth Behr-Sigel, dans son étude La femme est aussi à l’image de Dieu, montre que les Pères, malgré tant d’influences contraires, n’ont pas cessé, du moins dans leurs enseignements fondamentaux (il en est d’autres), de préserver et de mettre en œuvre partiellement, sur ce point, la plénitude, qui nous précède toujours, de la révélation évangélique.
Dans les chroniques, nous évoquons la figure de Paul Fidler, qui vient de mourir. Héritier de la philosophie religieuse russe, l’enrichissant, ici ou là, par sa connaissance de l’Occident et de l’Inde, Paul Fidler fut un de ces intuitifs parfois géniaux, souvent confus, nombreux dans la diaspora russe. Il ne parvint guère à s’exprimer, sinon dans le langage de la discontinuité et de l’errance. De cette destinée comme bâillonnée, il fallait tenter de dire ici le message essentiel : « L’homme est prière ».
Panis Lialiatsis rend compte du 5e Congrès panhellénique de théologie, qui a réfléchi sur le problème de l’éducation religieuse. Problème de première importance dans une société en plein bouleversement culturel, comme la société grecque contemporaine où il faut bien se décider à passer, sans rien rejeter du patrimoine, de la notion d’une culture chrétienne à préserver à celle d’une annonce renouvelée de l’Evangile. On appréciera l’effort de lucidité de certains pour briser l’enchantement irréaliste des mots, ainsi que l’appel à « une approche poétique » et à « l’humour théologique ».
Sommaire
Liminaire
[p. 2-3]
Monastère
[p. 4-32]
Tatiana Goritcheva
La signification du christianisme dans la philosophie religieuse russe des 19e et 20e siècles
[p. 33-61]
Pierre Rosniansky
La femme aussi est à l‘image de Dieu
[p. 62-70]
Elisabeth Behr-Sigel
Le thème du cœur dans la Philocalie (fin)
[p. 71-74]
Rodi Antoniadou
Chronique
– In memoriam : Paul Fidler 1900-1983
[p. 75-77]
Elisabeth Behr-Sigel
– « Religion et instruction ». Le 5e congrès panhellénique de théologie
[p. 77-82]
Panos Lialiatsis
– Mystagogie de l’image peinte de la Crucifixion du Seigneur
[p. 82-85]
Jerzy Nowosielski
Bibliographie
• Eglises et droits de l’homme – J.Lebeau, J.M.Aubert, F.Quéré, A.Weil, A.Mérad, F.Mondius, T.Tschuy, Ch.Wakenheim, O.Clément, E.Mélia
[p. 86-88]
• Droits de l’homme et perspectives chrétiennes – Gustave Thils
[p. 88-89]
• Comme un veilleur… Ouvrage collectif de l’ACAT
[p. 89-90]
• Hokhma n°20
[p. 90]
• Les exégèses grecques de l’Apocalypse à l’époque turque (1453-1821).
[p. 90-91]
Astérios Argyriou
• L’Apocalypse – H. Troadec
[p. 92-93]
• Patriarches – Germaine Colas
[p. 93-94]
• L’œcuménisme, où vont les Eglises ? – René Girault
[p. 94-95]