Contacts, n° 135

N° 135 – 3e trim. 1986

Liminaire

Les premiers textes publiés dans ce numéro sont consacrés au problème du mal dans la création « toute bonne » de Dieu. Devant ce problème, beaucoup de théologiens occidentaux se rallient à une sorte de teilhardisme (ou plutôt de dernier état du teilhardisme) qui affirme la « naturalité » du mal et de la mort, tandis que la plupart des théologiens orthodoxes se contentent de répéter les conceptions patristiques, liées à des représentations scientifiques périmées. Il importe de dégager l’esprit de ces conceptions et de voir comment l’articuler avec les découvertes modernes de la science.

Nous donnons donc d’abord des extraits de la 9e Homélie de saint Basile, — Dieu n’est pas l’auteur du mal —, choisis pour rappeler dans ses grandes lignes l’interprétation traditionnelle des premiers chapitres de la Genèse. Approche d’abord ontologique du mal, qui n’a pas d’essence, puis approche personnelle, existentielle, où la liberté de l’homme et de l’ange jouent un rôle décisif, fissurant l’être et donnant une consistance paradoxale au néant. Le tout dans la perspective d’une chute originelle où nous pouvons voir la symbolique d’une tragédie permanente, celle dont parle le Prologue de Jean en termes de « lumière » et de « ténèbres ». Mais comment relier cette perspective avec les découvertes de la science moderne, qui ne sont nullement des constructions éphémères, sauf, bien entendu, dans l’effort toujours repris pour lier d’une manière immanente les phénomènes enregistrés ? Le Père Georges Leroy, un jeune théologien orthodoxe qui prépare son doctorat à l’Institut St-Serge, à Paris, propose une hypothèse intéressante à partir d’une intuition de Grégoire de Nysse. Par une convergence significative, cette hypothèse avait été ébauchée dès 1964 (mais était restée inaperçue) par un remarquable spirituel suisse, nourri de la tradition des Pères, du personnalisme théologique de notre siècle et passionné par les recherches actuelles des savants, le Père Maurice Zundel, que l’on est en train de redécouvrir depuis la grande thèse que lui a consacré Marc Donzé. Nous donnons en annexe à l’article de Georges Leroy quelques pages d’un livre aujourd’hui épuisé de Zundel, L’Hymne à la joie¹, pages consacrées justement au thème du mal dans la création.

Dan-Ilie Ciobotea, sous-directeur de l’Institut Œcuménique de Bossey, montre comment une théologie vivante doit se nourrir de la vision eucharistique de la vie, tout en élucidant cette vision pour lui permettre d’animer l’existence entière du chrétien (Le rôle de la liturgie dans la formation théologique orthodoxe).

En chronique, un témoignage sur la personnalité de notre ami, mort prématurément, Panayotis Nellas ; une ample présentation de la grande Trilogie du Père Joanichie Balan sur la tradition monastique roumaine ; une notice nécrologique consacrée à sœur Antoinette Butte, fondatrice de la Communauté de Pomeyrol, un haut lieu de l’œcuménisme en France ; enfin une belle lettre d’un des prêtres les plus remarquables de l’émigration russe, le Père Alexandre Turincev (+ 1984), évoquant le souvenir de Jean Liamine dont un disque récemment mis en vente² présente, selon un choix judicieux, l’œuvre musicale.

P.S. Pour son quatre-vingtième anniversaire, le 14 septembre 1986, nous félicitons chaleureusement Germaine Revault d’Allonnes, co-directrice de la revue, notre infatigable « compagne de service » qui, en plus de ses soucis administratifs, a pu par sa formation, à la fois, de philosophe, de médecin et de théologienne, faire apprécier depuis plus de 30 années les si riches recensions bibliographiques, signées du sigle G.R.A., offertes à nos lecteurs. « Ad multos annos ! »

L’équipe de « Contacts »

1. Hymne à la joie, Éditions ouvrières, Paris, 1964.
2. Jean Liamine, Mélodies, œuvres instrumentales, chœurs religieux orthodoxes. Production : Jean Liamine fils, Association des Amis du Compositeur Liamine, 3 rue Cavendish, 75019 Paris.

Contacts

P.S. Pour son quatre-vingtième anniversaire, le 14 septembre 1986, nous félicitons chaleureusement Germaine Revault d’Allonnes, co-directrice de la revue, notre infatigable « compagne de service » qui, en plus de ses soucis administratifs, a pu par sa formation, à la fois, de philosophe, de médecin et de théologienne, faire apprécier depuis plus de 30 années les si riches recensions bibliographiques, signées du sigle G.R.A., offertes à nos lecteurs. « Ad multos annos ! »

Sommaire

Liminaire
[p. 169-170]

Dieu n’est pas l’auteur du mal
[p. 171-179]
Saint Basile le Grand

La présence du mal et de la mort dans la Création
[p. 180-194]
Père Georges Leroy

Le mal dans la Création
[p. 195-197]
Maurice Zundel

Le rôle de la liturgie dans la formation théologique orthodoxe
[p. 198-223]
Dan-Ilie Ciobotea

Chronique
• La sagesse de la tolérance : Panayotis Nellas
[p. 224-225]
Dumitru Staniloaë
• Une trilogie sur le monachisme roumain
[p. 226-233]
Père Romul Joantà
• In memoriam : Antoinette Butte (1898-1986)
[p. 233-235]
Nicole Maillard
• L’Église d’Orient est-elle patriarcaliste ?
[p. 235-237]
Élisabeth Behr-Sigel
• A propos de Jean Liamine
[p. 237-241]
Père Alexandre Turincev
• Un miracle au monastère de Néamtz (Roumanie)
[p. 241]

Bibliographie
• Parler de Dieu est dangereux – Tatiana Goritcheva
[p. 242]
• Sur ses pas – Jean-René Bouchet, op
[p. 243-244]
• Le mariage dans la perspective orthodoxe – Jean Meyendorff
[p. 244-245]
• L’altérité. Vivre ensemble différents – M. Gourgues et G.D. Maillhiot
[p. 245]